À l'heure du Brexit et des
élections aux États-Unis, les propos échangés et la violence des débats nous
amènent naturellement à nous interroger sur la nature de la démocratie et plus
précisément sur celle que nous privilégions dans les entreprises cotées et non
cotées.
Par chance, l'agressivité des débats électoraux n'a pas encore déteint
dans les Assemblées Générales, à part quelques cas limités et plutôt sans
conséquence. Paradoxalement, l'apathie des investisseurs minoritaires face à
des prises de contrôle rampante (Vivendi), la neutralisation du droit de parole
en Assemblée Générale « pour laisser la parole à tous... » (Renault),
voire des déclarations erronées (jamais mensongères) sont de vraies questions, certains
se demandant si cela a un intérêt d'écouter des questions d'actionnaires
« sans intérêt » et si la démocratie actionnariale n'est pas un
leurre.
En effet, à l'heure du temps réel dans les marchés financiers, quelle n'est
pas la stupeur de voir la difficulté de voter par Internet aujourd'hui en
Europe. La France dispose par exemple d’un outil dit « de place » qui
ne permet pas de voter pour des résolutions externes non approuvées par le
Conseil d'Administration. Ce fut notamment le cas chez Solocal : trop de
résolutions externes avaient été déposées, ce que le logiciel n'avait pas
prévu ! Il est facile ainsi de limiter le droit des actionnaires avec des
règlementations complexes (Italie) et des processus mal maitrisés par les
actionnaires, les banques et même les entreprises !
De même, alors que tous les actionnaires pensent avoir les mêmes droits en Assemblée Générale, ils n'ont pour la plupart pas réalisé qu'au sein du CAC 40, les sociétés étrangères (Airbus, STMicro, Arcelor Mittal, Solvay...) n'offraient pas les mêmes droits pour le dépôt de résolution, les convocations à l'assemblée Générale, le Say on Pay sur les rémunérations des dirigeants...
En Angleterre, les sociétés cotées doivent adhérer à un code de conduite, pourquoi ne demanderions-nous pas aux sociétés cotées à Paris de devoir adhérer au code Afep-Medef, et ce quel que soit leur pays d'origine ? Cela aurait le mérite de donner un minimum de droits communs aux actionnaires des sociétés cotées à Paris, en espérant que le vote par Internet sera généralisé et permettra à la démocratie actionnariale de s'exercer pleinement.
Nous espérons que ces propos « de bon sens » seront entendus car il en va de la vitalité de nos entreprises. Si nous voulons que les actionnaires les soutiennent dans les moments heureux ou difficiles et qu'ils soient des actionnaires de long terme, il est important de leur permettre de dialoguer avec l'entreprise, de comprendre les enjeux et de poser les questions qui lui paraissent pertinentes. Beaucoup de dirigeants préfèreraient peut-être que leur société ne soit pas cotée, pour ne pas avoir à répondre à de nombreuses questions « sans intérêt », mais il est important que tous les actionnaires puissent s'exprimer, comme en politique : sans tabou, mais avec respect et professionnalisme pour permettre un dialogue constructif sur le long terme.
Nos entreprises auront beaucoup à y gagner, nous aussi !
Olivier de Guerre
Phitrust