L'Assemblée
générale d'Alstom fin Juin a permis d'aborder tous les sujets sensibles
concernant la société et ses pratiques depuis plus de dix ans et plus
précisément pendant la période où Patrick Kron l'a dirigée. L'Association Sherpa
a notamment publié un long rapport détaillé reprenant les griefs de la justice
américaine sur des faits de corruption avérés, la société Alstom ayant plaidé
coupable et devant payer une amende de 772 millions de US dollars.
Même
si cette décision de la justice américaine peut paraître
« télécommandée » comme cela a pu paraître pour BNP PARIBAS, il est
clair que les faits de corruption qui lui sont reprochés ont existé et jettent
le trouble sur les méthodes utilisées par Alstom (mais aussi par de nombreuses
sociétés...) pour gagner des contrats dans leur pays ou à l'export. Il y a huit
ans, plusieurs investisseurs anglo-saxons avaient déjà exprimé leur inquiétude
à la direction générale d'Alstom sur des faits concernant le Soudan, mais sans
succès à l'époque...
Lors
de l'Assemblée Générale, Patrick Kron a indiqué qu'il avait une obligation de
réserve compte tenu des accords passés avec la justice américaine, ce qui
expliquerait qu'il ne peut publiquement se défendre... Mais la question, la
seule question qui ressort de ces enquêtes et de cette condamnation est
simplement : qui est responsable ?
Dans
d'autres cultures notamment asiatique, le chef prend acte des accusations et
démissionne prenant sur lui la responsabilité de l'échec. En France, le chef
démissionne rarement et Patrick Kron a indiqué qu'il ne comptait pas
démissionner pour ce fait ni renoncer à ses primes de départ.
Mais
alors qui est responsable ? Les salariés qui ont été mis en prison aux
USA, les dirigeants, les administrateurs ? Dans le cas d'Alstom (comme
dans beaucoup d'autre cas), personne ! Notre propos bien entendu ne
vise pas l'homme lui même, Patrick Kron ayant certainement des valeurs et une
éthique qu'il a essayé de mettre progressivement en place chez Alstom. Mais
elle interpelle le dirigeant, celui qui est le Chef qui, devrait endosser
jusqu'au bout sa responsabilité de dirigeant et démissionner pour permettre à
l'organisation de continuer dans un cadre différent.
Ces
affaires de corruption ont très certainement déstabilisé la direction générale
et le Conseil d'administration, pouvant s’amener à s'interroger sur la
pertinence de la cession de 75% de l'activité à General Electric et à la
configuration du nouvel Alstom uniquement ferroviaire sur un segment où il y a
de nombreux concurrents et peu de commandes en Europe.
A
l'heure où nous nous interrogeons sur les acquisitions de nos plus beaux
fleurons par des entreprises étrangères, les erreurs stratégiques et les fautes
de gestion sont des indicateurs avancés de mauvaise santé d'une entreprise et
cette dernière, ses salariés et ses actionnaires en paieront un jour le prix.
Nous
avons demandé à M. Patrick Kron d'assumer ses responsabilités en refusant ses
indemnités de départ. Il ne l'a pas fait et il a accepté d'être renommé
administrateur du nouvel Alstom. C'est bien dommage car il ternit un peu plus
l'image du dirigeant d'entreprise auprès des salariés, des actionnaires et des
français qui ne comprennent pas que le dirigeant, quant il a failli, ne se
sente pas responsable.
Olivier de Guerre
PhiTrust Active Investors