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Depuis plus de dix ans, nous croyons que l’éthique du management et la gouvernance ont un rôle fondamental au sein des entreprises dans lesquelles nous investissons pour le compte de nos clients.
Face aux défis immenses de la crise que nous vivons aujourd’hui, nous sommes de plus en plus convaincus que nos entreprises cotées en Europe ont besoin d’actionnaires minoritaires actifs qui les aident à développer des stratégies innovantes pour répondre aux enjeux financiers, commerciaux et sociaux de notre monde actuel, et nous essayons d’y contribuer par notre stratégie d’investissement.

30 janvier 2015

Petits actionnaires, les dindons de Lafarge

Alors que Lafarge a annoncé avec Holcim la cession d'une partie de leur activité pour pouvoir mettre en œuvre leur rapprochement, personne ne semble avoir pris en compte les attentes ou plutôt les inquiétudes des petits actionnaires français.

Ils se sont exprimés très fortement à la dernière Assemblée Générale de Lafarge en Juin 2014 en expliquant qu'ils étaient pour la plupart investis depuis leur PEA; la fusion avec une société suisse cotée à Zurich obligerait à sortir ces titres de leur PEA, en perdant leur exonération fiscale sur les dividendes et la plus value réalisée postérieurement à la fusion (ils seront exonérés jusqu'à la date de la fusion).

Ils ont très clairement exprimé leur mécontentement en précisant au PDG, Bruno Lafont, qu'ils étaient restés pour le soutenir dans les moments difficiles et qu'ils se demandaient s'il n'y avait pas une possibilité de rester investis au travers de leur PEA, pour ne pas avoir à céder leurs titres compte tenu de la fiscalité actuelle en France. Il leur a été répondu que cela n'était pas possible.

Si la fusion se réalise, il y a dès lors une très forte probabilité que les petits actionnaires de Lafarge cèdent leurs titres. Les porteurs français ne représentent plus il est vrai que 9% des actionnaires selon les chiffres que la société nous a récemment communiqué (dont 3% d'étrangers).

Et voilà comment en quelques années et après une fusion avec une entreprise suisse, disparaissent des actionnaires individuels de l'actionnariat d'une société et ce alors même qu'ils représentaient un ancrage historiquement important avec une politique constante du Président de Lafarge de favoriser l'actionnariat individuel...

Il existe pourtant une possibilité de garder ces actionnaires individuels dans le nouvel ensemble si plus de 5% des actionnaires refusent la fusion. Cela obligera la société Holcim- Lafarge à conserver une société Lafarge cotée à Paris, avec une gouvernance identique à celle de toute société cotée en France. Cela permettrait notamment aux actionnaires français de conserver les titres Lafarge dans leur PEA.

Ce schéma n'a jamais été présenté aux actionnaires, ce qui est compréhensible du point de vue du management car ce serait plus lourd à gérer (deux sociétés cotées, à Paris et à Zurich). Néanmoins ce schéma permettrait de garder un ancrage français avec la possibilité, si la fusion ne réussissait pas - plus des 2/3 des fusions transfrontalières sont des échecs.- , de remettre en bourse facilement une partie des actions détenues par la société suisse pour « déboucler »  l'opération.

La diversification mondiale et la complémentarité sont pour certains un atout, mais on peut s'interroger sur l'opportunité d'une telle opération qui conduira à devenir le plus grand groupe mondial alors que ce secteur reste industriellement très local.
Il s'agit plus d'une opération financière que d'une opération industrielle poussée probablement par les intérêts de certains actionnaires. De plus, la nouvelle gouvernance sera « à parité », mais comme il y a de nombreux administrateurs étrangers chez Lafarge... les français seront très minoritaires dans le nouveau conseil...

Beaucoup d'investisseurs institutionnels et de chefs d'entreprises se plaignent tous les jours de la faiblesse de l'actionnariat individuel en France et comme le disaient des actionnaires individuels en AG en 2014 : « vous nous laissez tomber quand vous n'avez plus besoin de nous » !

Il suffit que les actionnaires, gestionnaires d'OPCVM français et institutionnels refusent d'apporter leurs titres à l'OPR pour permettre aux petits actionnaires français de rester actionnaire de Lafarge en France. Ne faudrait-il pas se mobiliser pour ce faire ?

Olivier de Guerre
Président de PhiTrust Active Investors