Les récentes discussions sur la gouvernance d'EADS
montrent qu'il est difficile de rapprocher les intérêts des différentes parties
prenantes, principalement parce que les États concernés (Allemagne, France et
Espagne) ne peuvent se désintéresser d'un
groupe dont l'activité est au cœur de leur politique de défense. Et les
récentes décisions d'organisation des pouvoirs montrent qu'il est bien
difficile de concilier les points de vue, et ce alors même qu'EADS de par son
statut juridique (coté aux Pays Bas) a une gouvernance spécifique.
La gouvernance actuelle a d'ailleurs montré ses limites
que ce soit au niveau du choix imposé de son Président non exécutif (qui n' a
pas brillé par ses compétences...) qu'au niveau d'un projet industriel mené par les dirigeants opérationnels qui
aurait privilégié une organisation
complexe et de nouveaux liens Etatiques sans avoir préalablement demandé aux
États parties prenantes dans EADS si un teĺ schéma était possible...
Pourtant depuis plusieurs années nous interrogeons les
dirigeants d'EADS (sans réponse d'ailleurs) sur une autre voie qui permettrait
de réconcilier l'intérêt des différentes parties prenantes: plutôt que de
laisser EADS en bourse avec la complexité que l'on devine pour éviter que cet
outil industriel ne tombe dans l'escarcelle d'un non européen, ne faudrait-il
pas retirer de la bourse EADS en cotant
simultanément AIRBUS ?
Un tel schéma aurait plusieurs avantages: il permettrait de coter la filiale AIRBUS qui
attirerait immédiatement les investisseurs compte tenu de son positionnement et
de ses perspectives. Mais il permettrait à EADS de rester majoritaire ou
minoritaire avec la responsabilité du management de la filiale, pouvant ainsi
associer des industriels dans des zones importantes pour son développement au
capital et à la gouvernance. Il est plus facile par exemple d'associer des
chinois à la gouvernance d'AIRBUS qu'à celle d'EADS...
Ce schéma aurait en outre comme avantage majeur de
remettre sous le contrôle d'Etats européens le capital et la gouvernance d'EADS
et de sa stratégie militaire. En associant des investisseurs européens dans une
logique d'entreprise non cotée, EADS serait dans une démarche qui permettrait
de tenir compte des impératifs lies à son statut spécifique: être l'un des
outils industriels de la politique de défense européenne. Un tel statut ne peut
être lié à une démarche de cotation qui implique que les investisseurs ou
actionnaires externes puissent avoir un jour le contrôle de la société,
impliquant de ce fait des contorsions juridique pour arriver à avoir un "contrôle apparent" tout en ne le disant pas ouvertement...
Ce schéma aurait en plus l'avantage de clarifier les
rôles de chacune des parties prenantes au niveau des choix stratégiques, avec
plus de distance et de discernement pour le management compte tenu que la
gestion d'une entreprise cotée ne répond pas aux mêmes critères de transparence
que quand elle ne l'est pas...
Ce schéma aurait enfin la logique de séparer des
activités que les investisseurs internationaux socialement responsables ont du
mal à garder dans leurs portefeuilles, alors que ce sont des investisseurs de
long terme et éviterait de voir un jour trois États européens en situation
inconfortable si d'aventure une OPA hostile était lancée sur EADS.
Il est pour nous la voie logique et devrait être au cœur
des discussions actuelles sur la gouvernance d'EADS plutôt que la discussion
actuelle qui s'apparente plus à celle d'un marchand de tapis.
Olivier de Guerre
Président de PhiTrust Active Investors
olivier.deguerre@phitrust.com