Depuis de nombreuses années les régulateurs ont souhaité mettre en place au sein des établissements financiers et bancaires des règles strictes permettant d’éviter les éventuels conflits d’intérêts qui ne peuvent que survenir lorsque des clients sont communs à des activités distinctes dans un même groupe de sociétés contrôlées ou liées par leur actionnariat. Force est de constater que beaucoup de gestionnaires d’actifs (et ce quels que soit leur taille ou leur filiation) doivent prendre en compte, lorsqu’ils prennent des décisions de gestion impliquant des entreprises ou des dirigeants clients de leur propre société et/ou des sociétés filles ou affiliées,, le risque que leurs décisions pourrait remettre en cause un lien d’affaires ou des perspectives commerciales intéressantes à court ou moyen terme.
Bien évidemment nous sommes tous en permanence confrontés à la question du conflit d’intérêt quand une décision de gestion peut avoir un impact négatif sur un client/prospect et nulle règlementation ou code éthique ne pourra les prévoir à l’avance (et nous ne saurions bien évidemment porter un quelconque jugement dans une telle situation).
Cela pose une question fondamentale à tout gestionnaire d’actifs qui doit agir en son âme et conscience pour le compte de ses clients (certains pouvant avoir des intérêts contraires d’ailleurs) et il ne peut respecter cette obligation qu’en affichant préalablement son code de bonne pratique à l’ensemble de ses clients. Et c’est ce que beaucoup de gestionnaires ont réellement mis en pratique depuis quelques années, notamment dans le cadre de l’Investissement Socialement Responsable.
Malheureusement, nous sommes dans l’obligation de constater que cette année encore, des entreprises comme Total ou la Société Générale considèrent que le débat en Assemblée Générale sous la forme d’une résolution externe, non agréée par le Conseil d’Administration, est une forme d’agression inopportune et qu’il faut essayer par tous les moyens de bloquer, soit en convoquant une assemblée générale ordinaire et non extraordinaire, pour empêcher de fait le dépôt d’un résolution extraordinaire (Société Générale), soit en refusant de modifier l’ordre du jour de l’assemblée générale avec la résolution externe qui avait règlementairement le capital nécessaire pour être inscrite à l’ordre du jour, au prétexte que certains actionnaires s’étaient désistés après le dépôt de la résolution (Total).
Difficile de ne pas s’interroger alors, quand certains gestionnaires qui nous avaient accompagnés dans cette démarche depuis plusieurs mois ont décidé de se retirer et de ne pas poursuivre cette initiative collective et publique. Même si certains parlent en privé, aucun ne voudra officiellement expliquer les raisons qui l’ont poussé à modifier sa position, et pour cause !
Tant que le législateur ne renforcera pas le respect absolu de la "muraille de Chine" en séparant les activités de gestion d’actifs des autres activités financières (banque commerciale, banque d’affaires, assurance…), il sera difficile aux gestionnaires d’actifs d’agir en totale indépendance pour leurs clients. Les Etats-Unis avaient introduit la « Glass Steagall Act » en 1933, après la grande crise, (avant de l’abroger en 1999)… Il y a urgence à l’introduire en France !
Phitrust Active Investors
Investisseur et Actionnaire