La
Commission Européenne ayant donné son accord pour la fusion Lafarge Holcim,
cette opération devrait se concrétiser au premier semestre 2015 comme l'a
confirmé en décembre Bruno Lafont, PDG de Lafarge, qui prendra la direction
opérationnelle du nouveau groupe basé en Suisse.
Mais
il est très étrange que quasiment personne n'évoque plus ce qui a été l'objet
de longs débats lors de la dernière Assemblée Générale 2014 de Lafarge, de très
nombreux actionnaires individuels exprimant leur frustration, pour ne pas dire
plus, face à cette fusion.
En
effet, le siège social du nouveau groupe sera basé en Suisse, Holcim lançant
une OPA sur Lafarge, opération qui amènera à la disparition de la cote de la
société Lafarge si plus de 95% des actionnaires approuvent cette fusion.
Les
actionnaires individuels détiennent leurs titres généralement dans un PEA (plan
d'épargne en actions) qui les protège de la nouvelle fiscalité très élevée pour
la détention en direct. Si l'opération est votée à plus de 95%, ils deviendront
de fait actionnaires de la société suisse et ne pourront plus détenir ces
titres dans leur PEA (la réglementation limitant géographiquement à l'Union
Européenne la détention de titres non français).
Plusieurs
actionnaires individuels ont demandé à M. Lafont en Assemblée Générale s'il
comptait demander une évolution de la réglementation au gouvernement, ce qui ne
semble pas possible dans le contexte actuel...
Paradoxalement,
les actionnaires individuels ont exprimé leur « frustration » d'avoir
toujours soutenu le groupe Lafarge dans ses périodes difficiles et de se
trouver aujourd'hui obligés de vendre leurs titres avec la fusion car il n'y
aura aucun intérêt à détenir des titres suisses dans le futur, compte tenu de
la fiscalité qui s'appliquera alors...
Une
de nos plus belles sociétés françaises, emblématique depuis de nombreuses
années pour son rapport spécial avec les actionnaires individuels va ainsi, par
le jeu de « la fusion entre égaux », devenir une société suisse avec
quasiment aucun actionnaire individuel français, à moins... que ceux ci ne
votent contre la fusion Lafarge Holcim obligeant à ce que la société Lafarge
soit cotée en France s’il reste plus de 5 % d'actionnaires.
Dans
cette fusion il est clair que le Conseil d'Administration n'a pas pris en
compte les liens historiques des actionnaires individuels avec la société, préférant
privilégier une solution basée sur l'optimisation des intérêts pour certains
actionnaires qui ne sont pas impactés par ces effets fiscaux...
Nous
ne pouvons que le regretter et appeler à voter contre la fusion pour qu'il y
ait encore des actionnaires de la société Lafarge, même si celle ci est détenue
à plus de 70% par le groupe Holcim.
Espérons
que de nombreux actionnaires institutionnels français soutiendront cette
démarche car il est important de ne pas faire appel aux actionnaires individuels
qu'en cas de besoin et dans un second temps de ne pas s'attacher à respecter
leurs intérêts patrimoniaux. Sinon, à quoi bon rechercher des actionnaires
individuels ?
La
France a besoin que les actionnaires individuels réinvestissent dans nos
entreprises et le cas Lafarge est un exemple qui ne peut que les amener à ne
pas le faire. Réagissons vite !
Olivier de Guerre
Président de PhiTrust Active Investors